vendredi 25 juillet 2008

Un peu d'Histoire

La Roumanie est un pays qui a sans cesse connu des invasions, des éclatements de territoire et des unifications, qui ont partagé ou réunis, par la force des choses, des peuples aux us, coutumes et langages différents. L'héritage de cet Histoire est un pays où, dans un même village, se côtoient des saxons (peuple d'origine allemande), des hongrois et des roumains, chacune de ces communautés ayant conservé son langage d'origine.
Par exemple, je demandais son prénom à un petit garçon dans la rue, à Cobor, quand un voisin m'a dit qu'il parlait hongrois et qu'il ne comprenait donc pas ce que je lui disais!
A cela s'ajoute une forte population de Rroms (sédentarisés pour la plupart je pense), familles qui ont souvent beaucoup d'enfants et un langage qui leur est propre (le romani, mélange de roumain et d'hindi).
Les roumains ont la réputation d'avoir un don pour les langues. C'est vrai que je suis impressionnée, tous parlent au moins deux langues! Tous parlent le roumain et soit l'allemand ou le hongrois. La plupart des jeunes parlent l'anglais, appris en regardant les films à la télé. Les films sont tout le temps en V.O., sous-titrés roumains. Les vieux ont appris soit le russe, soit le français à l'école et ce, jusque dans les années post-communistes.
Après ça, ils n'ont pas de difficultés à parler espagnol ou italien, langues latines beaucoup moins complexes que le roumain (beaucoup de roumains travaillent en Espagne et en Italie).
C'est donc assez incroyable. Le hongrois est une langue parlée seulement par les hongrois (le finnois a les mêmes origines), très difficile d'après ce que l'on me dit. L'allemand, pas de commentaires. Je pense que le roumain est aussi difficile à apprendre que le français: il y a le datif, accusatif, vocatif...

Ainsi, des régions ont conservé une forte culture hongroise ou allemande (centre de la Transylvanie et Ouest de la Roumanie). La dernière ferme où j'étais est située près de Sibiu et Sighisoara, villes médiévales fortifiées particulièrement bien conservées, fleurons de la Roumanie, qui ont échappées aux transformations architecturales de Ceaucescu puisque le fils Ceaucescu y résidait... La famille Schuster est un exemple très représentatif de ce mélange culturel: Lavinia est née en Roumanie de parents roumains, Willy est né en Roumanie de parents hongrois et allemand. Il en résulte qu'ils parlent tous les deux ces 3 langues (Lavinia les a appris à l'oreille, une fois mariée!).

La Roumanie telle que nous la connaissons n'existe que depuis 1919-1920. Plusieurs de ses régions ont longtemps appartenues à l'Empire Austro-Hongrois, dissout à la fin de la 1ère Guerre Mondiale. Avec la redistribution des territoires, la Roumanie s'est vue doubler de superficie. Tatars (Mongols), Magyars (Hongrois), Saxons (Allemands), Ottomans (Turcs), Russes et Slaves ont tour à tour traversé la Roumanie, l'ont conquise, l'ont perdue et en ont fait un pays multiculturel. Les empreintes culturelles les plus fortes sont celles de la Hongrie, des Slaves et des Romains (l'Empire Romain s'est étendu en Roumanie et a marqué la langue roumaine de son latin).

Petite anecdote: à Cobor, jour de fête nationale, le pasteur, d'origine hongroise, hisse le drapeau de la Roumanie sur la paroisse... à côté de celui de la Hongrie! Mais ce n'est pas tout, celui de la Roumanie étant beaucoup plus petit que le hongrois! un peu provoc' Mr le Pasteur?
Attention, la Roumanie ne fait pas partie des Balkans! Les Balkans font références à la chaîne des Balkans, montagne qui traverse la Bulgarie d'est en ouest. Tous les pays en dessous de cette chaîne de montagne en font donc partie, mais pas la Roumanie.

Quant aux Tziganes (Rroms est moins péjoratif je crois), ils ont bien souvent mauvaise réputation. En reste-t-il encore en roulotte? je ne sais pas. J'ai eu l'occasion de croiser différentes communautés, que l'on reconnaît très bien de par leur costume. J'ai été très surprise d'ailleurs, je ne pensais pas que certains d'entre eux conservaient encore autant leurs traditions: jeunes filles aux jupes longues rouges à motifs, rubans tressés dans leurs longs cheveux, foulard rouge à motifs sur la tête; les hommes, chemise blanche, boléro, pantalon et chapeau noir. Apparemment, ces gens vivent encore de savoirs-faire transmis de génération en génération. D'autres ont troqué le cheval et la charrette contre une voiture; ils passent dans les villages récupérer de la ferraille, qu'ils revendent à des industries. C'est assez drôle de voir ces voitures qui débordent, prêtes à craquer.
Quoi dire d'autre de la Roumanie?
Tous les gens n'ont pas l'eau courante... et oui, c'est le cas de beaucoup de gens à Cobor par exemple, comme dans la plupart des petits villages. Mais la Roumanie est faite de petits villages!
Et une dernière chose, très importante à mes yeux, c'est la biodiversité! Des oiseaux magnifiques, des arbres fruitiers sauvages à craquer, qui croulent sous le poids des fruits (2 arbres chez Erwan sont tombés, trop lourds de fruits), des prairies riches en graminés, des collines où se côtoient cultures, prairie, haies... Voilà, c'est beau quoi! Et les bergers et vachers sillonnent la campagne à longueur de journée.

jeudi 17 juillet 2008

Aurélie n'a plus peur des vaches

A Ploiesti, unde nu mai sunt albine (ou il n'y a plus d'abeilles)... il y a cependant Doinita, avec la lumiere et le rire dans les yeux. Une intelligence feminine: une force tranquille mais vive, qui a compris le sens de la marche du monde... et qui attend patiemment la visite de sa fille, partie loin des siens.

A Bucarest j'ai vu que l'ennui est sentiment international. On le trouve la ou le on-line et la consommation de drogues plus ou moins dures (vitesse, cafe, cigarettes, shopping) voile l'esprit des humains. C'est ce que j'appelle le neant, relativement bien illustre par les chiens errants a Bucarest. Peau poisseuse et chaleur poussiereuse. Pas de moustiques. L'air les a tous englue comme sur un vieux papier mouche collant.

Mais Manu! Manu Chao tu as fait vibrer les electrons de cette atmosphere lourde! Romania! Romania! Grande exaltation. Multumesc mult! Tu m'as aide a evacuer un trop plein d'energie accumule entre l'ennui et le manque de personnes aimees avec qui rire...
Tchakatac, tchakatac, tchakatac, youuuuuuuu!
Tchakatac, tchakatac, tchakatac...
Les coudes sur les fenetres, le nez et les yeux plisses, les oreilles ouvertes aux otites... Que j'aime les trains roumains! Passages d'une ambiance a une autre, entre traditions et modernite, traditions et looks vintage... ma tete tourne comme une girouette.

Et a quand la charrette? La charrette, si elle embarque Paulette, ne l'y remettra pas de si tot les pieds sur terre. Au contraire, les pieds dans la terre, au plus pres des racines. En attendant, va pour Mosna, la cosmopolitaine, avec ses 3000 habitants! Allemand, roumain, hongrois, anglais, francais... concentre dans un meme foyer.
Tellement de situations differentes en si peu de temps, que la nouveaute est mon quotidien. Quand rien n'est habitude, que raconter?
Manu Chao dans la tete, les monuments communistes, et si les civilisations ne duraient que 200 ans, ou en est-on dans la civilisation occidentale?

Le gros sac sur le dos, y a-t-il quelqu'un dans la ferme? Mais oui, tout va bien, le poulain est dans la cour et les visiteurs de la ferme bio affluent. Willy ouvre les bras. Ah! Tu es la! J'allais justement t'appeler!
Alors, pour trouver sa place, on est a peu pres pret a tout: repasser le linge, tuer les mouches... Ici le pain est integral, les gens sont polyglottes et Grand-mere a Alzheimer. Et tandis que je tue les mouches, on parle de la Bible. Matin du 14 juillet, La Marseillaise au petit dejeuner. Militantisme agricole roumain et chants revolutionnaires... quant a moi, j'ai trouve ma Bible: Les semences de Kokopelli.
Petit a petit, mes affaires s'arrangent: j'apprends a faire le pain, le fromage et je garde les vaches.

mercredi 16 juillet 2008

Semences de vie

"Revolution verte: nommee ainsi car a permis d'engendrer beaucoup de dollars, de couleur verte."

"Les pesticides sont necessaires car des plantes gavees [les plantes absorbent des quantites excessives de NPK au detriment d'autres micro-nutriments et oligo-elements (calcium, zinc, cuivre, magnesium, fer, etc.). Cela se produit meme quand les mineraux sont presents en abondance dans le sol.] deviennent tres susceptibles a toutes sortes de pathogenes."

"Les pesticides promeuvent l'emergence de pestes de plus en plus resistantes."

"La selection de varietes reellement resistantes [qui pourrait etre un travail effectue par les scientifiques] est un processus qui ne genere aucun benefice."

"Remettons les pesticides dans leurs bouteilles avant qu'ils ne nous envoient tous dans des cercueils."

"Hybride signifie monstre en grec."

"Les nouvelles semences (hybrides, OGM...) [...] sont une aberration ecologique: elles envahissent de vastes regions en eradiquant les semences natives et les varietes traditionnelles. Cependant, les semences natives ont permis de produire les nouvelles semences et qui plus est, sans elles, aucun progres varietal n'est possible."
"Dans un systeme de polyculture, 5 unites d'intrants [pesticides, herbicides, fongicides...] sont utilises pour produire 100 unites de nourriture, ce qui represente un ratio de productivite de 20. Dans la monoculture industrielle, 300 unites d'intrants sont necessaires pour produire 100 unites de nourriture, ce qui represente un ratio de productivite de 0,33. Un systeme de polyculture est donc 60 fois plus productif qu'une monoculture a haut rendement."
"En depit de prouesses technologiques et scientifiques, et apres des decades d'enfouissement de substances toxiques dans les sols de la planete, l'agriculture chimique a failli a sa tache d'alimentation. Il est reconnu, qu'en depit des pretentions elevees de l'agriculture moderne, son bilan est completement negatif en ce qui concerne la securite alimentaire."

"La capacite meme [...] des transgeniques a resister aux pestes souleve de tres grandes interrogations. Les resistances induites genetiquement vont tres facilement declencher des micro-evolutions chez les parasites. Cela signifie que le parasite peut produire de nouvelles souches qui seront resistantes au transgene en question. (Robinson. 1996:400)."

"Le paysan est un co-createur dans le processus de l'evolution de la Mere [la Terre Mere]. Etre en harmonie avec la nature est source de prosperite; aller contre la nature amene a la ruine."

"Une seconde revolution verte envahit le Tiers-Monde [les pays en voie de developpement], celle des biotechnologies et des organismes genetiquement modifies alors que, pendant 40 ans, les chantres de la premiere [revolution verte] declarerent qu'elle etait la solution miracle et definitive a la faim dans le monde."
Extraits de Semences de Kokopelli, 6eme edition (2006), Dominique Guillet.

"Je ne me permettrais pas de vous decrire un seul de ces desastres s'il n'existait pas quelques solutions permettant d'y remedier. Il existe quelque chose que tout un chacun puisse realiser dans son jardin, sur sa ferme, et au travers du choix de nourriture qu'il acquiert. [...] La question reste de savoir comment. [Il est necessaire de prendre en compte] les pourcentages des diverses cultures necessaires a une production maximale et durable de calories."
Pour une explication plus detaillee, cf. How to grow more vegetables, de John Jeavons, specialiste du jardinage bio-intensif.
Extraits de la conference de John Jeavons donnee durant le rassemblement annuel du Seed Savers Exchange, USA, Ete 1998, et reportee dans Semences de Kokopelli, 6eme edition.

Wwoof à Manest (Ploiesti)

Manest est une commune a 20 km de Ploiesti, une ville qui s'est developpee sur l'industrie petroliere. C'est une region particulierement peu attirante, comme me l'avait dit Simona, native de Ploiesti... le paysage s'etend a perte de vue sur la plaine, ce qui choque quelque peu lorsque l'on vient de la montagne et de ses paysages magnifiques!
Un couple d'une cinquantaine d'annees vit dans une petite ferme, qui consiste en fait a elever des poulets et autres volailles, des cochons et deux vaches, tout ca pour leur propre consommation. Le lait des vaches est transforme en Branza, fromage typiquement roumain, avec un fort gout de vache, qu'on dirait qu'on est dans l'etab'. Mais, accompagne de tomates, au petit dejeuner, ca passe.

Puis ils ont aussi un jardin et deux ou trois champs de mais.
Le mari, Georghe, est secretaire a la mairie ( et tres, tres, tres fier de sa "localite") et sa femme, Doinita, s'occupe du travail avec les animaux, du fromage et de la cuisine.
Je crois qu'ils n'ont pas bien compris le principe du Wwoof: ils refusaient de me faire travailler! "C'est les vacances ici, profites!" Mais je n'avais pas envie de vacances moi! Ca ete dur pour moi de n'avoir rien a faire et de changer de rythme de vie comme ca: reveil a 9h, grosse sieste l'apres-midi (sous les conseils de Doinita, qui faisait de meme, et de la chaleur accablante, qui abrutit) et puis entre, lecture, tele, repas (copieux!). Bref, je m'y suis plutot ennuyee...

On est bien alle deux ou trois fois dans le mais, eclaircir les rangs, couper les plants trop serres... mais c'etait une petite heure par-ci, par-la, a partir de 19h, quand on est bien sur que la chaleur soit tombee... et jamais sans le chapeau!
Retour a la maison, Georghe se charge de sortir le tabouret dans la cour: place aux petits verres a tuica (alcool de prunes)! "Aurelie! Tuica!", "Da, da!...". "Aurelie! Il est bon, hein?", "Da, da!...". "Aurelie! Autre?", "Nu, nu, merci...", mais le verre est deja plein. Et il ne manquait pas une occasion de se moquer de ma volonte de travailler: "Aurelie! toute la nuit on va travailler dans le mais, hein?!"... "Da, da!..."

Bref, j'avais la sensation de perdre beaucoup d'energie! Je n'y suis restee que 5 jours.

Mais le tableau n'est pas si noir, il y a eu de bons moments et j'ai vraiment beaucoup apprecie Doinita. Elle est pleine d'energie (entre les siestes), elle est simple, franche, naturelle. Et puis ca ete pour moi l'occasion de gouter a la cuisine roumaine, telle que j'ai pu la lire dans mon guide Lonely Planet et sur les cartes des restaurants!
Mamaliga cu Branza (polenta avec du fromage), Ciorba (soupe) de legumes, de viande ou avec des oeufs, poulet frit au petit dejeuner, riz au lait (ou pates au lait!) agremente de zeste de citron rape (excellent) et le Cozonac!! Aie, aie, aie, c'est un malheur!! C'est une brioche garnie de noisettes concassees, sucre, rhum... Que Doinita a fait en grande quantite, comme le veut la tradition, en l'honneur du 7eme anniversaire de la mort du pere de Georghe. On s'en est fait peter le bide et on a bien rigole.

Bref, Doinita est tres bonne cuisiniere et un sacre bout de femme!
Au final, en partant, j'avais un pincement au coeur et une larme au coin de l'oeil. Tous les trois a passer sur la voie de chemin de fer, un "raccourci" bien connu quand on est en retard, et a grimper sur le quai comme on pouvait... pour, au final, avoir le train qui devait etre passe depuis une heure... bref, les trains sont rarement (jamais?) a l'heure en Roumanie.
Wwoof pas trop intensif mais accueil tres chaleureux! et hotes au grand coeur.

samedi 5 juillet 2008

Au revoir Cobor, en avant les Carpates!

Adieu Cobor, mais pour un temps seulement! du mal a croire, en partant, que l`on ne peut pas revenir a cet endroit si beau! Ce fut pour moi un vrai bol d`air, dans un lieu vraiment vivifiant!

Fin juin, le temps est venu, pour Anne et moi, de continuer notre route. Anne a Iaci, en moldavie roumaine, et moi, je ne savais pas trop ou, avant d'aller dans une autre ferme.

Mais j'avais tres envie de marcher dans les Carpates. Envie d'experimenter le temps lent de la marche, qui est le temps le plus en harmonie avec le rythme de l'Homme, dans ces montagnes dont rien que le nom fait rever! Juste etre la, entre l'espace et le temps.



Depart a 2000 m d'altitude, de la Cabana Miorita (refuge). J'ai commence ma marche dans cet etat d'esprit. Libre car confiante. J'etais, a priori, sans danger, puisqu'a une altitude elevee, au dessus des forets ou tronent les ours.
Seule dans la plaine (tres peu de touristes a cette periode), petit element entre le ciel et la terre. L'espace immense m'etait ouvert. Au coeur de la vie et du vide. Un grand bol d'air en plein desert avec seulement quelques marquages pour indiquer mon chemin.

Puis un ours est apparu sur mon chemin. Il est arrive sur ma gauche, de la plaine, perpendiculaire a mon sentier. Il avancait d'un pas lent, calme. C'etait probablement un male car pas tres grand et seul. Des que je l'ai vu, grande respiration et "Oh putain!", j'ai continue tout droit, sans oser regarder de nouveau dans sa direction, en esperant qu'il ne me suive pas! Longtemps apres, je me suis retournee. Il n'y avait plus rien. Reve ou realite? Le fait est que j'ai vraiment eu peur, j'etais seule; il y avait une voiture au loin et un berger avec des vaches. Mais tu ne peux pas imaginer que ta vie va s'arreter la, attaquee par un ours et seule! Tu te dis que toujours il y a une solution.

Je suis allee vers le berger, qui n'etait pas vraiment inquiet. J'etais a environ 1h30 du prochain refuge, de la "Cabana". J'ai continue un peu, "pour voir". Apres le prochain virage, c'etait un passage dans la foret qui m'attendait. Je devais prendre une decision: continuer ou rebrousser chemin? Continuer, au risque de croiser d'autres ours. J'etais au milieu de nulle part et je devais prendre une decision. Comme quoi, ou que nous soyons, nous sommes confronte au choix! J'ai decide de rebrousser chemin. Je suis retournee a la Cabana Miorita, en partie avec le couple de Belges que j'ai croise de nouveau, environ la troisieme fois depuis le matin.



Adieu la foi en l'inconnu et en l'harmonie avec la nature! retour a la case depart, dans le milieu de l'apres-midi. J'ai amorce une liberte a laquelle j'ai renonce par peur de l'inconnu.

Cela dit, j'ai passe un bon moment a la Cabana Miorita. Apres m'etre rassasiee et rechauffee (a la Tuica! eau de vie locale), j'ai dormi pendant plusieurs heures, jusqu'en debut de soiree. L'experience m'avait epuisee. Les Belges etaient redescendus. Dans ce refuge, il y avait un roumain qui chantait aussi bien qu'un chanteur d'opera et s'en donnait a coeur joie. Il parlait francais; il connaissait Goerges Brassens, Renaud et son album en Ch'ti! Il a essaye de m'imiter l'accent! Il avait eu l'occasion d'aller dans le Nord. Encore une fois, j'ai vu un ours! Il s'est retrouve en sandwich entre moi, sur la colline, partie faire un petit tour, et les gens du refuge qui le faisaient fuir. Oups! Mais tout s'est tres bien passe, il etait en partie domestique, il venait chercher a manger dans la gamelle du gros Saint Bernard. Un homme des secours, present a ce moment, lui a parle, calmement, puis il est parti (l'ours). Le voici, cet ours:


Puis le lendemain, j'ai retente ma chance. Je ne savais pas trop si je devais insister, mais je ne pouvais pas croire qu'il etait impossible de traverser ces montagnes! Tout etait si bien balise, avec des Cabana un peu partout pour y passer la nuit!

Cette famille roumaine etait les premiers que je voyais qui partait marcher. Ils ont accepte que l'on marche ensemble, mais je me suis un peu sentie parasite. Nous avons passes de bons moment ensemble, mais je me suis quand meme greffe a leur randonnee. C'est toujours delicat, lorsque l'on veut a tout pris atteindre un but, de prendre le risque d'entraver la liberte des autres. Il s'est passe la meme chose le lendemain, je me suis joint a un groupe de moldaves pour atteindre le pic le plus eleve des Monts Bucegi, a 2507m d'altitude (oui, c'est bas pour le francais!).


La haut, l'ambiance etait tres etrange. Les deux filles qui tenaient la Cabana n'etaient pas tres chaleureuses. Jamais je ne me serai attendue a voir deux filles travailler la! Elles restent la tout l'ete, completement coupees du monde, pas d'eau courante ni d'electricite. Je me suis sentie dans une atmosphere aride. Si pres du ciel, la tete dans les nuages, mais les pieds sur le roc. Il y avait la deux jeunes roumains de 17 ans, venus passer la nuit avant de continuer leur route le lendemain.


Je suis redescendue seule le lendemain. J'ai pu renouveler l'experience de la marche seule, de nouveau tester les limites d'une telle entreprise. Je suis parvenue a mon but sans souci, j'ai pu profiter de l'espace vide. Au final, ce sont les humains qui sont le plus a craindre je crois!
Voila. Et puis j'ai pris le telepherique pour descendre a la ville la plus proche, Busteni. Il traversait de magnifiques falaises a pic.

Une fois en bas, l'orage a eclate et une pluie torrentielle est tombee.
"J'espere qu'un jour tu croiras en Dieu", m'a dit Florin. Oui, j'espere qu'un jour j'aurai la foi, qui me permettra de marcher sans fin sur une route inconnue! Je n'ai pas invente cela, De la marche, d'Henry David Thoreau, m'a beaucoup plu a ce sujet. C'est cette marche sans but, sinon celui de vivre l'instant present, que j'aimerai effectuer.
J'ai vraiment beaucoup aime ce moment dans les montagnes.



Florin est un etudiant de 21 ans que j'ai rencontre a la gare de Ploiesti. Je venais de louper mon train pour Targoviste, le dernier de la journee, apres pourtant 2h d'attente sur ce quai, en plein soleil! Je l'ai probablement tranquillement regarde partir, comme tous les precedents, absorbee par mes pensees et attendant qu'il soit annonce. Mais non, la voie n'a jamais ete annoncee et en plus il etait a l'heure! Bref, j'ai du choisir une autre destination. C'est en choisissant Brasov que j'ai rencontre Florin. Nous avons bien discute dans le train et au final, il m'a offert l'hospitalite de son petit appartement d'etudiant pour une nuit. La nuit s'est finalement transformee en un week-end!


Merci Florin d'avoir ete un si bon guide de Brasov, meme sous la pluie! et un bon hote. "Take care, take care, take care...", c'est ce qu'il n'a cesse de me repeter. "Surtout n'accepte jamais une telle invitation" (d'etre hebergee par un inconnu). "Ca veut dire que j'ai une bonne tete alors? La tete de quelqu'un d'honnete?". Il en etait tres content et tres fier. Les roumains sont tres attentifs a l'image qu'ils vehiculent a l'etranger. Ils sont persuades d'avoir mauvaise reputation et sont vexes de l'image que les gitans donnent de la Roumanie. Cela dit, c'est pas faux, nous assimilons facilement, je pense, les roumains aux communautes de Roms.
Florin parle un anglais a l'americaine, appris en regardant la tele (la plupart des films sont en VO, sous-titres en roumain) et se souvient assez bien du francais qu'il a appris a l'ecole. Il est surpris que je ne fume pas: dans tous les films francais, les acteurs fument! Il adore imiter l'accent francais en anglais, ce qui fut une grande lecon d'humilite pour moi bien sur...


Son reve est d'aller a Paris. Pour lui, la langue francaise est la plus belle du monde. Il aime sa melodie. C'est d'ailleurs parce que je suis francaise qu'il m'a invite chez lui. Il nous trouve toujours tres sympathique. Globalement, les roumains apprecient beaucoup les francais.

Puis j'ai quitte Brasov pour experimenter le Wwoof dans une autre ferme, pres de Ploiesti. Simona, je suis allee dans ton pays! Mais malheureusement, je me suis plutot ennuyee...mais chaque experience a son charme.