vendredi 6 juin 2008

Des nouvelles de Cobor!

Ça a commencé comme ça. Une heure de retard au départ, cinq à l'arrivée. Et entre, quelques situations rocambolesques, comme un accident avec un bus genévois -TPG, la compagnie de bus dans laquelle travaille papa...bien sûr!- les vitres éclatées, quelques blessés (de légères gouttes de sang sur les jambes de dames qui ont reçues des bris de verre), mais surtout une équipe de chauffeurs roumains imperturbables, qui ont très bien su gueuler comme des putois, en roumain de surcroit car ils ne parlaient pas le français.

Habillés très chic les chauffeurs, mais très nerveux! Parlaient avec de grands gestes, se sont pris la tête avec des voyageurs autour d'une énorme valise noire, recouverte d'un sac poubelle et scotchée tant bien que mal, qui prenait l'eau sous la pluie en attendant d'être rangée dans la soute du bus...la propriétaire de la valise n'était pas vraiment tracassée, alors ça a duré dix minutes cette histoire, pour savoir à qui c'était, etc. Je me suis régalée de ce spectacle! Mais à mon égard, pas d'embrouilles, bien au contraire: toujours le petit sourire pour la petite française, qu'ils devaient bien se demander ce qu'elle foutait là d'ailleurs. Mais mon guide s'est bien occupé de moi. Sorin (se prononce Sorine) ingénieur agronome roumain, en Erasmus à Clermont Ferrand, a pris le bus à Lyon avec moi. Mathilde a eu la chance de le rencontrer. Il parle très bien français. Nous avons passé tout le voyage ensemble: voisin de siège, mais aussi professeur de roumain et bon camarade pour papoter de choses et d'autres.
Je me suis très vite rendu compte, quand est venu le moment de son arrêt (il descendait un peu avant moi), que l'on s'attache très vite aux gens pendant un voyage! j'étais déjà bien triste de le voir partir, la p'tite boule dans la gorge, quand on ne sait pas à qui on va parler maintenant!
Petit moment de panique par la suite.
Le bus avait donc 5 heures de retard et je n'arrivais pas à joindre Erwan (=Ivor) pour le prévenir. Mais il était bien là quand le bus s'est arrêté 1/4 de seconde pour me déposer. FAGARAS! et hop là, pas une minute à perdre, j'étais la seule à descendre là. Résultat, j'ai oublié mon duvet dans le bus! Et merde, je m'en suis rendue compte sur le chemin vers la maison. Mais Erwan a passé les environ 5 ou 6 coups de fil nécessaires, pendant trois jours, pour savoir s'il avait été retrouvé. Miracle (d'après Erwan)! Oui! Alors si tout se passe comme il faut, je le récupère lundi prochain, au bureau d'Eurolines, au prochain passage du bus.

Bon, je détaille, je détaille... mais ça fait déjà plusieurs jours que j'ai hâte de raconter tout ça! Il y a Internet dans la maison donc c'est très pratique mais tout le travail qu'il y a faire ici et le rythme soutenu de la journée laisse peu de temps pour se poser écrire toutes ces aventures.

Mercredi, première journée ici et toute seule, puisqu'Erwan avait son activité de taxi. Il a eu cette idée pour aider les gens du village et ça lui permet d'avoir un petit revenu. Ça évite aux villageois de se taper 5 ou 6km à pied, avant de prendre un bus qui met environ 2h à aller à Fagarâs (25km) pour acheter une bricole ou payer une facture. Erwan leur propose un service ultra perfectionné: il vient les chercher devant leur porte, les aide dans leurs courses (s'il faut porter des meubles par exemple) et les dépose devant chez eux au retour. Il a une voiture où il peut mettre 7 personnes et une remorque. En attendant, petite promenade avec les chiens pour decouvrir les alentours...













Il y aurait beaucoup à dire d'Erwan. Il est passionné par ce qu'il fait, il parle très facilement de ses choix de vie, il y réfléchit beaucoup, c'est très intéressant de discuter avec lui. Pourquoi avoir quitter la France, sa place ici, etc. Je l'entends qui dit "j'ai des idées". C'est exactement ça, il a plein d'idées, tout le temps. Mais je ne me sens pas de développer maintenant sinon j'en ai pour des heures! Il a un sacré caractère. Il est breton. Je sais pas si y'a un rapport...

Et comment ça se passe ici? Et bien je suis arrivée et Rosa, une américaine, est partie le lendemain. Mais Anna, allemande, est arrivée le même jour. Nous sommes donc deux wwoofers et trois avec Ivor. Il était bien emmerdé avec toutes ces nanas qui viennent le voir. C'est plutôt d'hommes qu'il a besoin pour construire tous ses murs et creuser des trous!
Mais je crois que l'on commence à faire nos preuves avec Anna et que ça le rassure. Non seulement on arrive à creuser une tranchée, à monter un mur et à faire du béton, mais en plus on lui fait bien à manger!



Parce qu'Ivor n'aime pas faire la cuisine. Manque de bol, Rosa n'était pas costaud mais en plus elle ne faisait pas bien la cuisine. Ivor est très tracassé par son célibat. Il ne sait pas comment faire pour qu'une femme vienne vivre avec lui. Une française, elle ne tiendra pas le coup en Roumanie et une roumaine, elle ne veut pas d'un bouseux comme lui! C'est un sujet de discussion qui revient souvent! J'en parle aussi ouvertement que lui nous en parle. Il est très spontané et parle sans tabou de beaucoup de sujets. Il est très humain.

Chez lui, c'est en partie en chantier et en partie retapé... c'est magnifique ici. Ça respire la vie. On entend mille bourdonnements, mille chants d'oiseaux, les grillons. Les abeilles butinent, elles ne sont pas en voie de disparition ici! Je suis arrivée la nuit et j'ai été étonné de la vie la nuit. Je crois que jamais je n'avais entendu une nuit aussi vivante. Il y avait des milliers d'étoiles, des oiseaux qui chantaient et les grillons!! J'arrive en plein été.


On parle français toute la journée, on voit deux roumains qui travaillent à la scierie mais qui disent vaguement bonjour. Mon "Salut" ("salout") enjoué n'a pas eu de réponse le premier jour alors je me suis contentée d'un signe de la main le lendemain :). Tout ça pour dire que je me sens comme en France! Jusqu'à ce que mon regard s'élargisse aux champs alentours et au reste du village. Il faut savoir qu'ici nous sommes vraiment un village au bout d'une route. En montant sur la colline, il n'y a pas une maison alentour sur plusieurs kilomètres. Les femmes travaillent dans les champs en plein cagnard, les hommes fauchent à la main, les chevaux tirent les charrettes. Il n'y a que 5 voitures dans le village, dont une qui appartient à berger très riche qui se présente aux élections municipales et qui donnent de l'argent à tous les gitans du coin et autres personnes intéressées en échange de leur vote... :).

Mercredi, je me lève de ma sieste, Anna et Ivor arrivent. J'ai la tête dans l'coltard et c'est parti pour aller chercher le lait. On sort de la cour, on descend le chemin et là, grande émotion. Le village est magnifique. Une simplicité et une lenteur démesurées comparé à notre mode de vie. J'ai été submergé par cette beauté, l'envie de pleurer. Chemin blanc, maisons colorés, verdure, chant des grillons, chemin blanc, chevaux, chiens, chemin blanc qui serpente, en harmonie avec les couleurs alentours. Moi qui ai toujours eu une certaine nostalgie d'un temps que je n'ai pas connu, je suis servie!
Sur la route, on s'arrête à plusieurs maisons, s'assoir sur les bancs sur les seuils de portes, pour discuter avec les habitants. Ivor parle très bien roumain.
Puis on arrive à la ferme, les 3 vaches du paysan rentrent seules du champ et hop! la traite à la main! je suis sciée, je ne m'attendais vraiment pas à ça. Toute chamboulée la Paulette.